Duruflé tres équilibré

L'ensemble Variations a donné un concert totalement consacré à des oeuvres de Maurice Duruflé, pour choeur, soliste, instrumentistes et orgue. Un beau programme interprété avec beaucoup de professionnalisme à l'église de Steinbourg.
C'est indiscutablement une heureuse initiative que de se concentrer sur un seul compositeur, surtout que l'unité très perceptible d'emblée est la dévotion du maître au grégorien. Ce choix d'ordre spirituel et esthétique marque profondément les pages données en concert ce soir-là à l'église de Steinbourg. Le lieu était d'autant plus indiqué que l'orgue, restauré au cours des dernières années, est un joyau romantique assez exceptionnel.
 
Damien Simon régnait en maître sur l'ensemble instrumental et vocal.
Christophe Mantoux en a tiré un excellent profit pour les deux pièces d'orgue, dont la deuxième, prélude et fugue sur le nom A.L.A.I.N., exercice obligé auquel se sont livrés bien des compositeurs à propos d'autres auteurs comme Bach. Il a fait usage des ressources très variées et parfois moins familières que celles des orgues baroques, alternant sonorités moelleuses et pleins jeux somptueux ou faisant dialoguer des registres contrastés. Il a, par ailleurs, été très efficacement présent dans le Requiem à presque chaque instant.
L'ensemble vocal Variations a débuté par une série de pièces a capella, dont quelques motets souvent présents au répertoire choral. Les qualités vocales sûres et indiscutables apparaissent à l'évidence dans ces pièces où aucun instrument n'offre de soutien : justesse, qualité de timbre, équilibre des pupitres, dialogue mené avec entrain pour des pages où les pupitres et les styles (grégorien et polyphonie) se répondent très fréquemment. Le Domine Jesu Christe en était une convaincante illustration : commencé dans la gravité (aux deux sens du terme) ce morceau s'installe dans une audace affirmée, évoquant le jugement dernier, pour revenir à une sérénité finale, alors que presque tous les pupitres ont eu leur moment de priorité.
Les 9 instrumentistes, issus de l'orchestre philharmonique de Strasbourg, ont apporté leur compétence et leur enthousiasme pour l'exécution de cette belle oeuvre dont la facilité d'écriture et d'interprétation n'est pas précisément le trait principal. Le groupe très compact des cordes, présents en permanence, les deux trompettes qui ont assuré à ce Requiem sa solennité et, par moments, les grondements de la colère divine doublés par les timbales, la harpe exprimant avec bonheur le côté aérien de certaines pages, ont tous tenu de façon très sûre leur part musicale, avec quelques moments où les instruments ont pu couvrir les voix. Au demeurant, l'équilibre entre orchestre et choeur était bien respecté. Le Pie Jesu très intériorisé, sur un mode d'aria de cantate avec accompagnement d'orgue et de violoncelle, a donné l'occasion à Claudine Morgenthaler d'affirmer ses belles qualités vocales au riche vibrato.
Damien Simon régnait en maître sur l'ensemble instrumental et vocal, le geste précis et enveloppant, le sourire encourageant, d'une attention très utile pour les interprètes. Ses qualités combinées d'organiste et de chef de choeur le désignent légitimement pour ce type de travail.

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Publié le 25/04/2006 | Retour à la page Presse | Précédent | Suivant