Joyeuses variations

Ebersmunster
 
L'ensemble vocal Variations et l'orchestre Antichi Strumenti ont prouvé que la musique baroque est tout sauf ennuyeuse, dimanche, lors d'un concert fort enjoué, dans le cadre des heures musicales à l'abbatiale d'Ebersmunster.
 
 
En guise d'invitation, les chanteurs déclarent d'entrée "Elargissez les portails, élevez les portes du monde", quand quelques instants auparavant, les gargouilles de la façade transformaient le parvis de l'abbatiale en chute d'eau sous l'ondée printanière. De fait, l'enthousiasme des Strasbourgeois et de leur chef Damien Simon a tôt fait de réchauffer les corps et les âmes. Le motet "Sehet, welch eine Liebe"alterne une basse déclamatoire en latin et une mélodie très enlevée pour un accord final majestueux. Ces deux oeuvres sont de Gottfried August Homilius, élève du grand J. S. Bach, organiste et compositeur de nombreuses pièces pour choeur. La filiation est mise en évidence par Jérôme Mondésert aux claviers de l'orgue Silbermann avec la Fantaisie en ut du maître.
L'organiste titulaire de Saint-Paul et Sainte-Aurélie de Strasbourg a choisi pour la circonstance des pièces dans le style français, particulièrement adaptées à l'instrument d'Ebersmunster. Johann Ludwig Krebs fut lui aussi un disciple de Bach. Son catalogue de pièces chorales comporte un splendide Magnificat chanté sur un texte allemand que les choristes ont entonné avec ferveur après un interlude lyrique et inattendu par l'entremise d'une sonnerie portable oubliée (l'air du toréador de Carmen, sûrement).
 
Point d'orgue
Retour à J. S. Bach pour une pièce d'orgue en sol, merveille de finesse et de virtuosité. Les motifs vifs et la trille finale semblent imiter un chant d'oiseau, le rouge-gorge qui orne les autels latéraux de l'abbatiale, peut-être. Gaiement, les musiciens proclament en fanfare l'invitation à la louange dans la première partie fuguée du motet "Louez Dieu, tous les peuples". Sans faiblir, et soutenus par une basse continue redoutablement efficace, les choristes de Variations exultent dans les motifs allègres de la dernière partie ne reposant que sur le seul mot "Alleluja".
D'un même entrain, les membres d'Antichi Strumenti interprètent le mouvement Vivace d'une sonate en trio initialement composée pour l'orgue et adaptée pour l'ensemble à cordes, comme cela se pratiquait à l'époque. Epoque de laquelle datent les instruments joués par Tobias Bonz et Laura Toffeti, les fondateurs de l'orchestre baroque. Les trois motets et la pièce d'orgue qui suivent oscillent entre tendresse, générosité et virtuosité, qualités qui suggèrent une transition vers un style mozartien. Le concert s'achève en apothéose à double choeur dans un "Jauchzet dem Herrn", acclamation lancée vers les voûtes qui longtemps résonneront de cette joie partagée.
B.A.

© Dernières Nouvelles D'alsace, Mercredi 25 Mai 2005.Tous droits de reproduction réservés
Publié le 24/05/2005 | Retour à la page Presse | Précédent | Suivant